Saturday, March 16, 2013

Fmr. Head of the French DGSE, Alain Chouet: "In Syria we would be arming those we are fighting in Mali!"

"...Le Point.fr : Est-il opportun que la France livre des armes à l'opposition syrienne ?
Alain Chouet : Je suis confondu par cette affaire. On se trouverait complètement en dehors de la légalité internationale, dans une situation sans précédent. Pour prendre une comparaison, c'est comme si la France, en 1992, avait décidé unilatéralement d'armer le GIA (Groupe islamique armé) et le FIS (Front islamique du salut) algériens, sous prétexte qu'ils avaient gagné les élections et que les militaires avaient interrompu le processus électoral. Dans le cas de la Syrie, nous armerions des groupes non représentatifs et reconnus par personne, si ce n'est par nous ! l'ONU n'a pas reconnu l'opposition, et d'ailleurs, de quelle opposition parlons-nous ? Elle est totalement hétéroclite et divisée, les militaires ne reconnaissent pas l'autorité des politiques et, à l'intérieur de la composante militaire, les milices djihadistes ont pris le pas sur les autres. ..." 
Vous connaissez extrêmement bien la Syrie, où vous avez longtemps été en poste et dont vous parlez la langue. Quelle est votre appréciation globale sur la situation ?
Depuis deux ans, la situation s'est gravement dégradée. On est dans un pays dévasté, ruiné, en proie à des affrontements ethniques et confessionnels, où rien ne sera plus jamais comme avant. On est entré dans une logique de guerre civile semblable à celle qui a ensanglanté le Liban pendant 15 ans. Mais je vous le dis nettement : ce n'est pas en armant des salafistes qu'on va arriver à une solution. D'une façon hypocrite, la France a appelé à une solution négociée en disqualifiant d'emblée une des parties sommée de ne pas se présenter à la table des discussions, en l'occurrence le pouvoir en place. Que reste-t-il alors à négocier ? Depuis le début de cette affaire, on se trouve dans le flou militaire, juridique, politique ou idéologique. J'ai le plus grand mal à m'y retrouver. On est dans une ambiguïté absolue en soutenant en Syrie ceux contre lesquels on lutte ailleurs.
Pouvez-vous être plus précis ? 
J'évoque ici le Mali. Même si comparaison n'est pas raison et si les islamistes qui se manifestent au Mali ne sont pas les mêmes qui se battent en Syrie, ils ont les mêmes objectifs, les mêmes inspirateurs, les mêmes idéologues et les mêmes financiers. Je trouve ça tout à fait curieux. Et en tant qu'ancien responsable d'un grand service de l'État, je suis assez perturbé par ces choix bizarres et antagonistes de nos diplomates et de nos politiques. "

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